CINÉMA
« J’ai besoin de faire du cinéma. Je ne vois pas comment, de nos jours, un peintre peut rester étranger à ce moyen d’expression. Si le cinéma use de mots, il se fait au moins pour une part égale avec des images. Or, tout ce qui est image concerne la famille des peintres à laquelle j'appartiens. »
Note personnelle, 1971
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Le premier travail filmique de Charles Matton, La Pomme ou l’Histoire d’une histoire, court-métrage de 1966, joue de manière virtuose de tous les médiums qu’il pratique alors. Une étrange fluidité transforme des images animées en photographies, dessins ou volumes : sondant de fibre en fibre le cœur des êtres et des choses, cette œuvre ouvre d’abord la voie à d’autres courts-métrages, Activités vinicoles dans le Vouvray et Mai 68 ou les Violences policières.
Puis, en 1972, Charles Matton tourne son premier long métrage, L’Italien des roses, construction subtile mêlant deux trames narratives et utilisant flash-backs et films parallèles. Après L’Amour n’est qu’un fleuve en Russie (distribué sous le titre Spermula, 1976) et La Lumière des étoiles mortes (1994), où il évoque son enfance pendant l’occupation et l’émergence d’un artiste, il tourne en 1999 un Rembrandt, nourri de recherches historiques approfondies et habité d’une vision intime du destin de son lointain prédécesseur.
Avec le cinéma, Charles Matton assouvit son besoin de récit, de dramaturgie. Il ajoute à ses moyens d’expression habituels, non seulement les images en mouvement, mais aussi le travail du son, la musique, dont il suit attentivement la composition et les voix, la sienne et celle de ses acteurs – Isabelle Mercanton, Radiah Frye, Richard Bohringer, Jean Rochefort et bien d’autres… – comme celle de ses propres fils, Nicolas et Léonard Matton.
SCÉNARIOS ET RÉALISATIONS
| 1998 | REMBRANDT
Long-métrage — 1h43min.
Grand prix 1999 du meilleur scénariste pour Sylvie Matton et Charles Matton
César du meilleur décor 1999
Rembrandt van Rijn connut la gloire puis la disgrâce, refusant de plier son art aux modes de son temps ; fidèle à sa vision, il traversa deuils et faillite, et trouva dans la solitude la grandeur mystique qui marque l’aboutissement de son œuvre.
| 1994 | LA LUMIÈRE DES ÉTOILES MORTES
Long-métrage — 1h50min.
La Lumière des étoiles mortes est le film le plus personnel de Charles Matton, une évocation sensible de deux années d’enfance fondatrices, où se dessinent les origines de son œuvre, portée avec justesse et émotion par son fils Léonard, devenu le reflet vivant de l’enfant qu’il fut.
| 1976 | L’AMOUR EST UN FLEUVE EN RUSSIE (SPERMULA)
Long-métrage — 1h43min.
Une société secrète venue d’ailleurs envoie un commando de femmes pour soumettre les hommes en les « libérant » de leur virilité, source de tous les maux ; mais cette croisade contre l’orgueil et le désir bascule quand le sexe, l’amour et la chair reprennent leurs droits, pervertissant à leur tour ces prêtresses d’un monde sans passion.
| 1972 | L’ITALIEN DES ROSES
Long-métrage — 1h21min.
Primio di Selezione, Festival de Venise, Semaine de la Critique 1972
Grand Prix. Perspectives, Festival de Cannes, 1973
Inspiré d’un fait divers américain, le film raconte comment une foule d’abord compatissante devient hostile face à l’hésitation d’un homme prêt à se jeter dans le vide, tandis qu’au milieu d’elle, un homme reste seul, agenouillé en prière.
| 1970 | ACTIVITÉS VINICOLES DANS LE VOUVRAY
Court-métrage — 14 min.
« Je suis incapable d’en raconter l’histoire. C’est une histoire de vendanges avec une belle nana… Je n’ai jamais de scénario entre les mains. En tout cas, j'étais vendangeur. Je nous vois en train de tourner, je me vois encore sur le tracteur. Jean-Pierre Rassam regardait Angela McDonald dans une sorte d’extase. » Richard Bohringer, 2018
| 1968 | PARIS, MAI 68 OU LES VIOLENCES POLICIÈRES
Court-métrage — 8 min.
Co-réalisé avec Hedy Khalifat
Sept minutes trente-quatre de tension brute et de poésie noire : un film à part dans l’œuvre de Matton, où la rue devient théâtre de guerre, les flics cognent, les corps tombent, et la bande-son haletante martèle l’urgence d’un cri politique, viscéral, jeté à la face d’un pouvoir aveugle.
| 1966 | LA POMME OU L’HISTOIRE D’UNE HISTOIRE
Court-métrage — 16 min.
Grand prix du festival de Hyères, Grand prix de la Biennale de Paris
Premier film de Charles Matton, cet ovni intime et sensoriel mêle dessins, gravures, voix, textures et silences pour raconter — ou plutôt évoquer — une vie ordinaire : un couple, des enfants, des pommes sur une table. Œuvre fondatrice, ce film expérimental fait éclater les frontières entre peinture et cinéma, entre figuration et abstraction, révélant déjà l’obsession de Matton pour les détails invisibles, les objets du quotidien, les visages aimés, les espaces habités — tout ce que l’art seul peut rendre palpable au cœur du réel.







FILMS SUR CHARLES MATTON

| 2009 | CHARLES MATTON, VISIBLEMENT
43 min.
Prod. Arte France — Kuiv Prod.
Réal. Sylvie Matton
Un documentaire qui retrace la carrière de Matton et souligne la manière intime et critique avec laquelle la vie et l’œuvre de l’artiste se répondent.
| 1989 | DOUANES
28 min.
Prod. INA
Réal. Sylvie Matton